À la frontière Estonie-Russie, la bataille des mémoires en héritage
Au nord-est de l’Estonie, la ville de Narva se trouve à la frontière avec la Russie et porte encore les stigmates des invasions successives qu’elle a subies au cours de son histoire tumultueuse. De l’occupation soviétique à l’occupation nazie, puis de nouveau soviétique, les habitants de Narva sont marqués par ces événements tragiques qui ont laissé des cicatrices profondes dans leur mémoire collective. Cette bataille des mémoires, héritée de ces périodes sombres, pourrait-elle profiter au voisin russe ? C’est ce que tente de comprendre Elena Volochine dans son reportage.
Depuis la chute de l’Union soviétique en 1991, l’Estonie a fait le choix de tourner la page de son passé communiste pour se tourner vers l’Europe et l’OTAN. Cependant, la population de Narva, majoritairement russophone, entretient des liens forts avec la Russie et conserve une certaine nostalgie de l’époque soviétique. Cette situation crée des tensions avec le gouvernement estonien, qui cherche à affirmer son indépendance et son identité nationale, notamment en commémorant les victimes des régimes totalitaires qui ont sévi dans le pays.
Le conflit mémoriel qui divise Narva et l’Estonie pourrait jouer en faveur de la Russie, qui cherche à entretenir des relations privilégiées avec sa minorité russophone vivant à l’étranger. En exploitant la nostalgie de l’époque soviétique et en se présentant comme le protecteur des Russes à l’étranger, Moscou tente de renforcer son influence dans la région et de fragiliser la position de l’Estonie sur la scène internationale.
Face à cette stratégie russe, les autorités estoniennes tentent de sensibiliser la population de Narva aux dangers de l’ingérence étrangère et de promouvoir une mémoire collective qui met en avant les valeurs démocratiques et européennes. Des initiatives culturelles et éducatives sont mises en place pour rappeler les crimes des régimes totalitaires et encourager la réconciliation entre les différentes communautés de Narva.
En conclusion, la bataille des mémoires qui se joue à la frontière Estonie-Russie est le reflet des divisions et des enjeux géopolitiques qui marquent l’Europe de l’Est. Face